mercredi 2 août 2017

Cimetières militaires allemands autour de Verdun


Les images qui suivent ont été prises le 15 et le 16 mai 2017, ce sont trois cimetières militaires allemands : le cimetière militaire allemand de Saint-Mihiel dans la forêt domaniale de Gobessart (6046 soldats allemands de la Guerre 14-18), le cimetière militaire allemand d’Epinonville (1151 soldats allemands de la Guerre 14-18) et le cimetière militaire allemand de Romagne-sous-les-Côtes (2226 soldats allemands de la Guerre 14-18).
Il y a 30 nécropoles allemandes dans le seul département de la Meuse. Les plus importantes sont celles de Consenvoye (11146 soldats), de Hautecourt (7885 soldats) et de Cheppy (6130 soldats). Dans les 30 cimetières militaires allemands de Meuse sont enterrés 85400 soldats allemands.

Il y a des cimetières militaires allemands en France… mais ils ne sont pas très beaux. Le traité de paix signé à Versailles en 1919 avait attribué la charge d’aménager les cimetières au pays où les morts étaient tombés. Les Français ont donc organisé, sur leur territoire, ceux destinés aux morts allemands, tandis que les Allemands s’occupaient de ceux pour les prisonniers français décédés en captivité. Mais les Français ont fait le minimum. Ils ont aussi écarté les nécropoles allemandes des lieux sacrés. Par exemple, pour la bataille de Verdun, le cimetière allemand le plus proche de l’ossuaire et de la nécropole française de Douaumont (16 000 tombes) se trouve à 14 kilomètres de là ! Jusqu’en 1926, les Français se sont occupés seuls des nécropoles allemandes. Puis ils ont accepté qu’une association privée allemande les aménage, ce qu’ont fait des étudiants germaniques bénévoles pendant leurs vacances. Ceci explique pourquoi on ne trouve pas de beaux cimetières allemands en France. Alors qu’il y en a ailleurs, du côté d’Ypres (théâtre de la bataille des Flandres) notamment, en Belgique, avec de très belles sculptures.


Pourquoi les croix des cimetières militaires allemands implantés en France sont-elles généralement noires ? La première explication voudrait que les allemands aient simplement choisi cette couleur car elle est pour eux symbole de deuil. De la même façon, ils ont choisi la façon dont étaient implantés les croix, ainsi que les différentes essences d'arbres et de plantes qui agrémentent ces cimetières. Ce dernier point est confirmé par la Convention Franco-Allemande de 1966 mais celle-ci ne fait nulle mention des couleurs des croix.
Une autre théorie prétend que, jusqu’en 1966, les cimetières allemands de la Grande Guerre étaient sous tutelle administrative française. Chaque tombe était alors matérialisée par une croix de bois recouverte d’une couche de bitume afin d’éviter le pourrissement. Les Allemands ont ensuite remplacé ces croix de bois par des croix en alliage fonte et aluminium mais en conservant l’aspect sombre d’origine.
La troisième explication, très répandue celle-là, affirme que cette couleur a été attribuée par les alliés au lendemain de la Première Guerre Mondiale afin de distinguer leurs tombes blanches et immaculées de celles des vaincus jugés responsables de la barbarie sans nom qui vient de s'achever. Certains pensent même que cette décision est inscrite dans le Traité de Versailles, mais si un chapitre est bien consacré aux sépultures dans ce texte il n'est toutefois fait aucune mention de ce détail colorimétrique (En lisant le Traité de Versailles on comprend pourquoi il y a eu une deuxième Guerre Mondiale).

Il est d'autant plus difficile de démêler le vrai du faux que l'on trouve des exceptions dans certains cimetières allemands implantés en France, avec parfois des croix en pierre, en grès ou en schiste. La vérité emprunte sûrement un peu à chaque théorie. Une certaine liberté aurait été laissée pour l'agencement des cimetières militaires suivant les pratiques culturelles de chaque nationalité (disposition des tombes, orientation, indications, gestion des espaces verts...), mais un régime particulier aurait tout de même été imposé aux vaincus (tombes noires et absence de drapeau). Cette thèse serait d'autant plus crédible que le noir n'entrerait apparemment pas dans la tradition mortuaire germanique (à l'arrière du front les sépultures militaires allemandes sont généralement surmontées de croix blanches).


Ce qui est sûr c'est que c'est l'Allemagne qui paie l'entretient de ces cimetières et nécropoles, par l'intermédiaire du Volksbund Deutsche Kriegsgräberfürsorge qui a pour mission de recenser, préserver et entretenir les tombes de soldats allemands à l'étranger. L'Etat français a accordé à l'Allemagne (plus précisément à la République Fédérale d'Allemagne de l'époque), la libre disposition des terrains sur lesquels sont implantés des nécropoles ou des cimetières militaires allemands, gratuitement et sans limitation de durée. Mais les terrains restent la propriété de l'Etat français.



En forêt de Gobessart (Cimetière allemand de Saint Mihiel) - C'est un cimetière militaire allemand comme les autres, parfaitement entretenu, avec des haies taillées qui le clôturent, planté de quelques arbres, mais isolé au beau milieu de la forêt... à quelques kilomètres de Saint-Mihiel.
Comme les autres, les belles portes d'entrée en bronze ont été dérobées. Comme les autres, il a ses croix noires, alignées ici de façon conventionnelle, où se mêlent quelques stèles juives. Entre les lignes, on peut voir des plaques gravées portant plusieurs noms. Comme dans certains autres, de belles sépultures sculptées ont été conservées et regroupées au fond du cimetière, de part et d'autre du monument central, ici surmonté d'une belle sculpture allégorique en pierre. Comme les autres, il est dépourvu de drapeau. Comme les autres, les noms des soldats de l'ossuaire sont portés par de grandes plaques sombres, disposées de part et d'autre du monument et l'on peut déplorer le vol cet hiver d'une partie d'entre elles. La présence d'une bougie prouve que le lieu n'est pas tombé dans l'oubli et que l'on vient ici honorer un aïeul tombé sur cette terre. Parmi les sépultures sculptées, on remarque la présence de monuments offerts par des camarades…


Le cimetière allemand de Gobessart - Situé à 4 kilomètres au sud-est de Saint-Mihiel sur les hauteurs dominant la ville, le cimetière allemand de Gobessart regroupe 6 046 corps de soldats, principalement tombés en 1914 et 1915, dont 2 austro-hongrois. Une illustration de la mort de masse et de la dimension des combats visant à réduire le saillant de Saint-Mihiel en 1915 - Dès le 20 septembre 1914, les Allemands attaquent sur les Hauts-de-Meuse, au nord-est de Saint-Mihiel. Le dispositif défensif français se réarticule afin de continuer à couvrir Verdun. La ville de Saint-Mihiel est conquise le 24 septembre. Les gains de terrain par les Allemands forment un saillant de 20 km de profondeur dans le dispositif français sur une ligne Les Eparges – Saint-Mihiel – Pont-à-Mousson. Les opérations françaises de reconquête sont lancées à partir du 25 novembre 1914 jusqu’en 1915. Ces opérations se caractérisent par des pertes françaises et se soldent par un premier échec lors de l’offensive de la Woëvre, en avril 1915. Après cette date et jusqu’en 1918, le saillant de Saint-Mihiel connait moins d’opérations jusqu’à la reconquête par les troupes américaines. 
 
L’aménagement du cimetière allemand de Gobessart après le conflit - Le cimetière de Gobessart est aménagé dès 1914 par l’armée allemande. Après la guerre, les autorités françaises décident de réorganiser le cimetière provisoire pour y rapatrier les corps des soldats allemands inhumés dans les cimetières de 48 communes, ainsi que deux monuments commémoratifs allemand. Le Volksbund Deutsche Kriegsgräberfürsorge (VDK) commence les travaux d’aménagement du cimetière dès 1930, puis remplace les croix de bois par des croix en métal et réhabilite les espaces verts.
Le monument commémoratif du cimetière - Au centre du cimetière se dresse un monument commémoratif, dominant l’ossuaire, bordé par un muret en grès rose des Vosges. Le monument commémoratif est structuré en trois parties : le socle en pierre calcaire recouvert de plaque en grès rose ; la base rectangulaire du monument en moellons de calcaire blanc ; la sculpture en pierre de taille. Cette dernière représente un homme torse nu, les cheveux bouclés et une barbe agenouillé et regardant vers le bas. Il tient dans sa main droite un casque à pointe aux armes de la Bavière, une épée reposant sur un drapé est apposé sur sa cuisse gauche et un fusil dans sa main gauche.
Un bien sélectionné dans le projet UNESCO - Cette nécropole fait partie de la série de 136 biens français et belge proposés à l’inscription sur l’ensemble du front occidental. Les sites funéraires et mémoriels de la Première Guerre mondiale retenus témoignent d’un rapport nouveau à la mort du soldat – qui s’explique par le caractère industriel et total de cette guerre – dont résulte un nouveau culte des morts.

 Romagne-sous-les-Côtes, une importante base arrière - Dans le village resté intact, les civils restants, femmes, enfants et hommes âgés, sont regroupés puis déportés vers l'arrière. Les maisons sont rapidement réinvesties pour servir de cantonnement, de foyer du soldat ou pour loger les états-majors. Un hôpital est aussi installé dans l'église. Bientôt, le village est électrifié au moyen de petites centrales électrogènes et sillonné par les lignes du réseau de téléphone qui maille toutes les positions de l'arrière front.


Progressivement, les installations vont s'étoffer et déborder le périmètre du village : au plus fort des opérations allemandes devant Verdun, ce seront 18 000 soldats allemands qui occuperont le secteur. Dans le cadre du déploiement d'un réseau de voies ferrées à usage militaire, Romagne est dotée d'une gare avec dépôt et triage. On implante aussi un ensemble de boulangeries, tandis qu'un camp de prisonniers russes est installé. Par ailleurs, le village étant de plus en plus exposé aux tirs de l'artillerie française et aux bombardements aériens, notamment à partir de 1916, on y aménage de nombreux blochkaus bétonnés qui offrent un abri en cas d'alerte.

Romagne garde d'importantes traces de ces années de guerre. Le village, presque totalement ruiné en novembre 1918 (seules quelques maisons anciennes ont été conservées) est marqué par l'empreinte architecturale de la reconstruction qui s'achève avec l'inauguration de la nouvelle église en 1934. Au pied de l'église, le monument aux morts de la commune associe combattants et victimes civiles mortes au cours de la déportation en Allemagne. En lisière du village, un cimetière rassemble les sépultures de 2226 soldats allemands et rappelle les sacrifices consentis par ces jeunes soldats durant la bataille devant Verdun.
 

 

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