jeudi 31 août 2017

de Gaulle parle aux Français depuis Londres


Charles de Gaulle, communément appelé le général de Gaulle, né le 22 novembre 1890 à Lille et mort le 9 novembre 1970 à Colombey-les-Deux-Églises, est un militaire, résistant, homme d'État et écrivain français.
Chef de la France libre puis dirigeant du Comité français de Libération nationale pendant la Seconde Guerre mondiale, président du Gouvernement provisoire de la République française de 1944 à 1946, président du Conseil des ministres français de 1958 à 1959, instigateur de la Cinquième République fondée en 1958, il est président de la République française du 8 janvier 1959 au 28 avril 1969. Il est le premier à occuper la magistrature suprême sous la Cinquième République.


 

Élevé dans une culture de grandeur nationale, Charles de Gaulle choisit la carrière d'officier. Il est fait prisonnier lors de la Première Guerre mondiale. Il sert et publie dans l'entourage de Philippe Pétain, prônant auprès de personnalités politiques l'usage des divisions de blindés dans la guerre contemporaine. En mai 1940, colonel, il est placé à la tête d'une division blindée et mène plusieurs contre-attaques pendant la bataille de France ; il est promu général de brigade à titre temporaire le 25 mai 1940. Il est nommé sous-secrétaire d'État à la Guerre et à la Défense nationale dans le gouvernement Reynaud, pendant l'exode de 1940.
Il rejette l'armistice demandé par Pétain à l'Allemagne nazie. De Londres, il lance, à la BBC, l'appel du 18 Juin au peuple français pour résister et rejoindre les Forces françaises libres. Condamné à mort et déclaré déchu de la nationalité française par le régime de Vichy, il veut incarner la légitimité de la France et être reconnu en tant que puissance par les Alliés. Ne contrôlant que quelques colonies mais reconnu par la Résistance, il fusionne, en 1943, la France libre au sein du Comité français de Libération nationale, dont il finit par prendre la direction. Il dirige le pays à la Libération. Favorable à un exécutif fort, il s'oppose aux projets parlementaires des partis et démissionne en 1946. Il fonde le Rassemblement du peuple français (RPF), mais son refus de tout compromis avec le « régime des partis » l'isole dans une « traversée du désert » à l'écart de toute responsabilité.
De Gaulle revient au pouvoir lors de la crise du 13 mai 1958, pendant la guerre d'Algérie. Investi président du Conseil, il fait approuver la Cinquième République par un référendum. Élu président de la République, il veut une « politique de grandeur » de la France. Il affermit les institutions, la monnaie (nouveau franc) et donne un rôle de troisième voie économique à un État planificateur et modernisateur de l'industrie. Il renonce par étapes à l'Algérie française, malgré l'opposition des pieds-noirs et des militaires, qui avaient favorisé son retour. Il décolonise aussi l'Afrique noire, en y maintenant l'influence française. De Gaulle prône l'« indépendance nationale » en rupture avec le fédéralisme européen et le partage de Yalta : il préconise donc une « Europe des nations » impliquant la réconciliation franco-allemande et qui irait « de l'Atlantique à l'Oural », réalise la force de dissuasion nucléaire française, retire la France du commandement militaire de l'OTAN, oppose un veto à l'entrée du Royaume-Uni dans la Communauté européenne, soutient le « Québec libre », condamne la guerre du Viêt Nam et reconnaît la Chine communiste.




Sa vision du pouvoir, c'est-à-dire un chef directement approuvé par la Nation, l'oppose aux partis communiste, socialiste et centristes pro-européens. Ils critiquent un style de gouvernance trop personnel, voire un « coup d'État permanent », selon la formule de François Mitterrand contre lequel de Gaulle est réélu en 1965 au suffrage universel direct. Il surmonte la crise de mai 68 après avoir semblé se retirer, convoquant des élections législatives qui envoient une écrasante majorité gaulliste à l'Assemblée nationale. Mais en 1969 il engage son mandat sur un référendum (sur la réforme du Sénat et la régionalisation) et démissionne après la victoire du « non ». Il se retire dans sa propriété de Colombey-les-Deux-Églises, où il meurt dix-huit mois plus tard.
Charles de Gaulle, considéré comme l'un des dirigeants français les plus influents de son siècle, est aussi un écrivain de renom. Il a notamment laissé des Mémoires de guerre, où il affirme s'être toujours « fait une certaine idée de la France », jugeant que « la France ne peut être la France sans la grandeur ».





CHARLES DE GAULLE - Origine : Français     -      Allégeance : France
Arme : Armée de terre          -            Grade : Général de brigade
Années de service : 1908-1940    -   Conflits : Première Guerre mondiale & Seconde Guerre mondiale
Commandements : 507e régiment de chars de combat & 4e division cuirassée de réserve
Faits d'armes : Bataille de Dinant ; Bataille de Verdun ; Bataille de Montcornet ; Bataille d'Abbeville ; Bataille de Dakar.
Autres fonctions : Homme d'État ; Président du gouvernement provisoire de 1944 à 1946 ; Président du Conseil des ministres français en 1958 ; Président de la République de 1959 à 1969




Première Guerre mondiale - Les quatre frères de Gaulle sont mobilisés comme officiers. Ils reviennent tous vivants et décorés. Charles qui était lieutenant depuis le 1er octobre 1913, est nommé capitaine en janvier 1915. Dès son premier combat à Dinant le 15 août 1914, il est touché à la jambe (« fracture du péroné par balles avec éclats dans l'articulation »). Il rejoint ensuite le 33e RI sur le front de Champagne pour commander la 7e compagnie. Il est à nouveau blessé le 10 mars 1915, à la main gauche, à Mesnil-Les-Hurlus en Champagne. Décidé à en découdre, il désobéit à ses supérieurs en ordonnant de tirer sur les tranchées ennemies. Cet acte lui vaut d'être relevé huit jours de ses fonctions. Officier tatillon, volontiers cassant, son intelligence et son courage face au feu le distinguent au point que le commandant du 33e RI lui offre d'être son adjoint.
Le 2 mars 1916, son régiment est attaqué et décimé, anéanti par l'ennemi en défendant le village de Douaumont, près de Verdun. Sa compagnie est mise à mal au cours de ce combat et les survivants sont encerclés. Tentant alors une percée, il est obligé par la violence du combat à sauter dans un trou d'obus pour se protéger, mais des Allemands le suivent et le blessent d'un coup de baïonnette à la cuisse gauche. Capturé par les troupes allemandes, il est soigné et interné. Cette disparition au front lui vaut d'être cité à l'ordre de l'armée.




Seconde Guerre mondiale -  Lorsque la guerre éclate, Charles de Gaulle est toujours colonel, commandant le 507e régiment de chars de combat (RCC), à Metz. En janvier 1940, il envoie à quatre-vingts personnalités, dont Léon Blum et Paul Reynaud, ainsi qu'aux généraux Maurice Gamelin et Maxime Weygand, un mémorandum fondé sur les opérations de Pologne. Intitulé L'Avènement de la force mécanique, le texte insiste sur la nécessité d'allier le char et l'aviation.
Trois jours avant l'offensive allemande du 10 mai 1940, qui conduit à une percée rapide du front français, le colonel de Gaulle est averti de la décision du commandement de lui confier la 4e DCR, la plus puissante des grandes unités blindées de l'armée française (364 blindés60) dont il prend effectivement le commandement le 11 mai.
Le 15 mai, il reçoit la mission de retarder l'ennemi dans la région de Laon afin de gagner des délais nécessaires à la mise en place de la 6e armée chargée de barrer la route de Paris. Mais sa division blindée n'est encore qu'en cours de constitution, ses unités n'ayant jamais opéré ensemble. Il dirige pourtant avec cette unité une contre-attaque vers Montcornet, au nord-est de Laon. C'est l'une des seules qui parviennent à repousser momentanément les troupes allemandes. Prévoyant la défaite rapide de l'armée française sous l'offensive allemande, les civils et les militaires désarmés sur les routes, il affirme que c'est durant la journée du 16 mai que « ce qu'[il] a pu faire, par la suite, c'est ce jour-là qu'[il] l'a résolu. » N'ayant reçu qu'une partie des unités de la 4e DCR, le colonel de Gaulle lance une première attaque avec 80 chars pour tenter de couper les lignes de communication des divisions blindées allemandes le 17 mai. Après avoir atteint ses objectifs dont la ville de Montcornet, la 4e DCR, n'étant pas appuyée, est contrainte de se replier face à l'intervention de renforts ennemis. Les autres unités de la 4e DCR ayant rejoint, une nouvelle attaque peut être lancée avec 150 chars qui, après avoir permis d'atteindre les premiers objectifs, est arrêtée par l'intervention de l'aviation d'assaut et de l'artillerie allemandes.



Le 21 mai, à la suite de la bataille de Montcornet, l'état-major envoie un correspondant de guerre pour interroger de Gaulle, qui lance à cette occasion, à Savigny-sur-Ardres, un premier appel radiodiffusé destiné à remonter le moral des Français en vantant les mérites des divisions blindées et qui se termine par la phrase : « Grâce à cela, un jour, nous vaincrons sur toute la ligne ».
Le 25 mai, il est nommé général de brigade à titre temporaire. Cette nomination, dans une promotion de six colonels, correspond au fait que de Gaulle en tant que commandant d'une division blindée depuis le 7 mai 1940, fait déjà fonction de général, ses trois collègues commandants de division blindée (DCR) étant tous déjà généraux. Elle suscite la satisfaction de Charles Maurras dans l'Action française.
Trois jours plus tard, le 28 mai, il attaque à deux reprises pour détruire une poche que l'ennemi a conquise au sud de la Somme, à hauteur d'Abbeville. Malgré un déplacement préalable de 200 km qui a lourdement éprouvé le matériel de la 4e DCR, l'opération est un succès. Elle permet de faire plus de 400 prisonniers et de résorber toute la poche à l'exception d'Abbeville, en raison de la supériorité en nombre et en artillerie de l'adversaire. Celui-ci ne peut franchir la Somme que plus tard au nord d'Abbeville, mais une deuxième attaque ne permet pas à la 4e DCR de prendre la ville.
Commentant le comportement militaire de De Gaulle sur le terrain, l'historien Henri de Wailly avance que celui-ci, loin d'avoir été particulièrement brillant, a montré dans la bataille « les mêmes faiblesses et les mêmes incompétences » que les autres dirigeants militaires. De son côté, le général Weygand, chef des armées, décerne, le 31 mai 1940, au général (à titre temporaire) de Gaulle une citation très élogieuse en tant que commandant d'une division blindée près d'Abbeville : « Chef admirable de cran et d'énergie. A attaqué avec sa division la tête de pont d'Abbeville très solidement tenue par l'ennemi. A rompu la résistance allemande et progressé de 14 kilomètres à travers les lignes ennemies, faisant des centaines de prisonniers et capturant un matériel considérable ». 



Le 6 juin, le général de Gaulle est convoqué d'urgence à Paris par Paul Reynaud, président du Conseil, pour occuper un poste ministériel dans son gouvernement, celui de sous-secrétaire d'État à la Guerre et à la Défense nationale. Charles de Gaulle sort alors de la hiérarchie militaire. Il a pour mission de coordonner l'action avec le Royaume-Uni pour la poursuite du combat. Le 9 juin, il rencontre Churchill qu'il tente en vain de convaincre d'engager davantage de forces, y compris aériennes, dans la bataille.
Le 10 juin, de Gaulle quitte Paris qui est déclarée ville ouverte. Il rejoint alors Orléans, Briare et Tours. C'est le moment des ultimes réunions du Comité suprême interallié où Churchill, lors de la conférence de Briare à laquelle de Gaulle participe, tente de convaincre le gouvernement français de continuer la guerre.
Le 16 juin, il est en mission à Londres. Il y dicte au téléphone la note de Jean Monnet à Paul Reynaud, intitulée Anglo-French Unity, et qui évoque une possible union franco-britannique.
De retour de mission, à Bordeaux, il apprend, le 17 juin, la démission du président du Conseil, Paul Reynaud, son remplacement par le maréchal Pétain et la demande d'armistice. Le même jour, le général Weygand alors chef d'état-major de l'Armée est nommé ministre de la Défense nationale. Le transfert des pouvoirs au maréchal Pétain n'ayant lieu que le lendemain, de Gaulle est encore membre du gouvernement et court alors peu de risques. Après maintes hésitations selon l'officier de liaison le général britannique Edward Spears, il a l'intention de regagner Londres. Il rencontre Paul Reynaud pour lui faire part de son projet. Ce dernier lui fait remettre par son ex-directeur de cabinet Jean Laurent 100 000 francs prélevés sur les fonds secrets pour sa logistique à Londres. Le 17 juin, accompagnant Spears qui n'a pas réussi à convaincre Reynaud et Georges Mandel de rejoindre Londres, il s'envole à Londres avec son aide de camp Geoffroy Chodron de Courcel dans le de Havilland Flamingo, son avion de la veille que Churchill a laissé à sa disposition.


 
Appel du 18 Juin 1940 -
Le 18 juin 1940, de Gaulle se prépare à parler au peuple français sur Radio Londres de la BBC. Ce jour-là, il appelle les Français, et tout particulièrement les militaires, à la résistance depuis l'Angleterre où il s'est réfugié. En France, l'appel du 18 Juin peut être entendu à 19 h. Depuis ce jour, ce texte demeure l'une des plus célèbres allocutions de l’Histoire de France, à l'origine du mythe faisant du général le « père de la Résistance » alors que ce dernier ne prend conscience de l'intérêt de la Résistance intérieure qu'à partir de 194173. Aucun enregistrement n'a été conservé, contrairement au discours du 22 juin 1940, que l'on confond parfois avec le véritable appel.
Le gouvernement britannique avait au préalable proposé au ministre français de l'Intérieur Georges Mandel de passer au Royaume-Uni et de lancer lui-même un appel. Par ses avertissements répétés contre les menaces du IIIe Reich (et en opposition à ce sujet avec son ami le président du Conseil Léon Blum), Mandel s'était signalé comme un homme d'État et de caractère. Tout au long de la journée du 18 juin, le Conseil des ministres britannique discute du texte de De Gaulle. Le cabinet britannique tente de s'y opposer, mais Winston Churchill le soutient74. Les anciens « Munichois », derrière le ministre des Affaires étrangères lord Halifax, veulent encore ménager le gouvernement Pétain et attendre de voir s'il va effectivement signer l'Armistice. Winston Churchill, vieux partisan de la fermeté contre Hitler et de la poursuite de la lutte, doit mettre son autorité dans la balance. De Gaulle peut finalement prononcer son texte, mais doit accepter d'en modifier les deux premières lignes75 dans un sens moins dur pour le gouvernement français. Cette modification longtemps occultée disparait dans le texte transmis à la presse, puis dans les Mémoires de De Gaulle.

Le 19 juin, Weygand, supérieur hiérarchique de De Gaulle, lui ordonne de revenir de Londres, ignorant l'invitation à poursuivre le combat que ce dernier lui adresse. Peu après, de Gaulle est rétrogradé au rang de colonel par son ministre, qui convoque successivement deux tribunaux militaires, lesquels le condamnent deux fois par contumace : le premier n'ayant prononcé qu'une peine symbolique — quatre ans de prison et la perte de la nationalité française — le second, à Clermont-Ferrand le 2 août 1940, le condamne à « mort, dégradation militaire et confiscation de ses biens meubles et immeubles » pour « trahison, atteinte à la sûreté extérieure de l'État, désertion à l'étranger en temps de guerre sur un territoire en état de guerre et de siège ». Sa déchéance de la nationalité française, en vigueur au 2 août, est confirmée dans un décret du 8 décembre 1940.
Parcours politique pendant la IVe République -
Le 16 juin 1946, de Gaulle expose sa vision de l'organisation politique d'un État démocratique fort à Bayeux, en Normandie, dans un discours resté célèbre ; mais il n’est pas suivi. Il inaugure alors sa fameuse « traversée du désert » jusqu'en 1958, date de son retour au pouvoir.
Fondation du RPF, Rassemblement du peuple français. -
En 1947, il fonde un mouvement politique, le Rassemblement du peuple français (RPF), afin de transformer la scène politique française, de lutter contre le régime « exclusif » des partis, de s'opposer à l'avancée du communisme et de promouvoir une nouvelle réforme constitutionnelle privilégiant le pouvoir exécutif. Il propose également une troisième voie économique (l'association capital-travail). Le RPF reprend également les thèmes de la droite la plus traditionnelle : ultra-conservatisme colonial (il critique jusqu'à la construction de lycées d'enseignement général à Madagascar), anticommunisme virulent (exploitant les inquiétudes sur l'avancée du communisme dans l'Union française et en Indochine) et même, au moins jusqu'en 1950, la clémence à l'égard de Philippe Pétain. Toutefois, les déclarations du colonel Rémy réhabilitant le rôle du maréchal Pétain seront immédiatement désavouées par le général de Gaulle, mais pas l'initiative de Terrenoire, demandant son amnistie. Il est vrai, comme le rappelle l'historien René Rémond (dans Les Droites en France), que c'est au nom de la réconciliation nationale qu'en 1949 et 1950, le même général de Gaulle plaidait pour l'élargissement du « vieillard de quatre-vingt-quinze ans ».
Le parti rallie des résistants (dont Jacques Chaban-Delmas) mais aussi des notables comme Édouard Frédéric-Dupont ou Edmond Barrachin (qui fut, dans les années 1930, directeur du comité central du Parti social français). D'anciens pétainistes et même d'anciens collaborateurs parviennent à s'y faire admettre, notamment dans les sections d'Indochine et d'Algérie, dans le service d'ordre, dans les rangs des syndicats ouvriers proches du R.P.F. et parmi les maires élus en 1947. Certains polémistes du parti, notamment Jean Nocher, déploient une extrême agressivité verbale. Pour ces raisons, l'historien Henry Rousso (dans Le Syndrome de Vichy) discerne au RPF « des tendances pro-pétainistes, soit qu’elles aient été envoûtées par la magie du verbe maréchaliste, soit qu’elles aient été convaincues de son impact dans l’opinion ». René Rémond (Les Droites en France) préfère rapprocher le RPF de la lignée du bonapartisme et du boulangisme, tout en observant que le RPF est, dans l'histoire du gaullisme, l'épisode le moins éloigné de « ce qu'en France on a l'habitude de qualifier de fascisme ».

Après un grand succès en 1947-1948 (35 % des suffrages aux municipales de 1947, 42 % des sénateurs élus en 1948), le RPF décline de 1949 à 1951. La gestion efficace des événements sociaux de l'automne 1947 par le gouvernement de la troisième force a affaibli le mouvement gaulliste. Le recours à de Gaulle semble alors moins nécessaire pour les conservateurs, les modérés et le patronat. Dans l'opposition, le RPF est frappé d'un véritable ostracisme de la part des autres partis politiques, entretenu par le refus du général de Gaulle de se compromettre avec les autres partis. En 1951, le RPF obtient encore plus de 4 millions de voix (22,3 % des suffrages et 16,8 % des inscrits) et 117 députés.
Le RPF est irrémédiablement affaibli par la défection de vingt-sept députés : ainsi, contre les consignes du Général, Édouard Frédéric-Dupont et Edmond Barrachin votent la confiance au gouvernement d'Antoine Pinay en 1952. En juillet, quarante-cinq autres font défection. Les gaullistes se divisent alors entre les loyalistes, qui fondent l'Union des républicains d'action sociale (URAS), et les autres, qui rejoignent l'Action républicaine et sociale (ARS).
Mise à l'écart du pouvoir -
Aux élections locales de 1953, le RPF perd la moitié de ses suffrages. Il entre alors en hibernation. Les élus gaullistes participeront encore avec le PCF à l'échec de la Communauté européenne de défense (CED) en 1954, avant la mise en sommeil définitive du RPF le 13 septembre 1955.
À la suite de la défaite électorale de son parti, le général de Gaulle se retire à Colombey-les-Deux-Églises et rédige ses Mémoires de guerre. Pour certains observateurs, ce sont les cinq années qui suivent qui constituent sa « traversée du désert » proprement dite (voir ci-dessus).

Retour au pouvoir en 1958 -
L'instabilité ministérielle, l'impuissance de la IVe République face à la question algérienne, déclenchée par une insurrection le 1er novembre 1954, conduisent le régime à une crise grave. Des responsables politiques de tous bords en viennent à souhaiter le retour du Général.
Le 13 mai 1958, un comité de vigilance appelle à manifester contre le FLN à Alger. Un comité de salut public est créé, à la tête duquel se trouve le général Massu, et dont fait aussi partie le général Salan. Ce dernier poussé par Léon Delbecque, lance son appel au retour du général de Gaulle « vive de Gaulle » du haut du Gouvernement général, devant la foule le 15 mai. L'insurrection prend de l'ampleur et risque de dégénérer en guerre civile. Le 19, le Général se dit « prêt à assumer les pouvoirs de la République ». Certains voient dans cette déclaration un soutien à l'armée et s'inquiètent. Il rassure et insiste sur la nécessité de l'union nationale et s'il se présente encore comme le recours, il ne donne officiellement aucune caution ni à l'armée ni à quiconque. Néanmoins, un plan d'action militaire, baptisé « Résurrection », a déjà été mis en place en cas d'échec des négociations politiques.
Le 29 mai, le président de la République, René Coty, fait appel au « plus illustre des Français ». Charles de Gaulle accepte de former un gouvernement. Sous pression, l'Assemblée nationale l'investit le 1er juin, par 329 voix sur 553 votants. Le général de Gaulle devient ainsi le dernier président du Conseil de la IVe République. Les députés lui accordent la possibilité de gouverner par ordonnance pour une durée de six mois, et l'autorisent à mener à bien la réforme constitutionnelle du pays.
La nouvelle Constitution, élaborée au cours de l'été 1958, est très proche des propositions avancées à Bayeux, avec un exécutif fort. Le général de Gaulle accepte cependant que le Parlement ait plus de poids qu'il ne le souhaitait. En particulier, de Gaulle doit renoncer à l'élection du président de la République au suffrage universel (un élément central de son dispositif constitutionnel qu'il finira par imposer en 1962).
La Constitution est adoptée par référendum le 28 septembre 1958, avec 79,2 % de « oui ». L'Empire l'approuve également, sauf la Guinée qui devient ainsi la première colonie française de l'Afrique sub-saharienne à obtenir son indépendance. Charles de Gaulle est élu président de la République le 21 décembre : il prend ses fonctions le 8 janvier suivant.
Entre le moment de son entrée en fonctions comme président du Conseil et son élection à la présidence de la République, Charles de Gaulle a largement amorcé la politique qui marquera son passage au pouvoir : outre la volonté de doter la France d'une nouvelle Constitution, le Général se soucie de la politique européenne de la France (rencontre avec le chancelier Adenauer le 14 septembre), de l'indépendance du pays face aux États-Unis (mémorandum du 17 septembre adressé au président Eisenhower), de l'assainissement des finances publiques (mesures du 27 décembre) et du sort de l'Algérie (il refuse les choix des comités de salut public et appelle à la « Paix des Braves » en octobre).

Mai 68. -
Outre la réforme financière de 1958, la France bénéficie des « Trente Glorieuses » et de la croissance amorcée sous la IVe République. Les structures économiques sont modernisées, le niveau de vie s'accroît. Mais la croissance profite inégalement à tous, et un certain désenchantement apparaît face au blocage de la société. Les événements de Mai 1968 en sont le révélateur. Comme dans de nombreux pays, la contestation des étudiants se développe à partir de mars 1968. Les syndicats et les partis politiques de gauche profitent des manifestations étudiantes pour lancer une grève générale qui sera suivie par les ouvriers. Cette grève générale paralyse le pouvoir pendant le mois de mai.
De l'avis de ses propres partisans, de Gaulle a été complètement surpris par une crise qu'il ne prévoit pas et ne comprend pas. Indifférent aux revendications étudiantes et à la « crise de civilisation » qu'elles révèlent, il ne voit là au mieux qu'un gigantesque chahut de jeunes qui ne veulent pas passer leurs examens, au pire une contestation de l'autorité de l'État à faire cesser sur-le-champ. Dans les premiers jours de mai, ses seules consignes sont de réprimer brutalement les manifestations étudiantes, contre l'avis de plusieurs de ses ministres qui conseillent l'apaisement.
Après la nuit des barricades du 10 mai au 11 mai 1968, de Gaulle, sceptique, laisse toutefois son Premier ministre Georges Pompidou, rentré d'un voyage en Iran et en Afghanistan, mener une nouvelle politique d'apaisement. Pompidou, qui a dû mettre sa démission dans la balance, veut éviter désormais les heurts, et parie sur l'essoufflement à terme du mouvement.
Du 14 au 18 mai, de Gaulle part en Roumanie. Or, en son absence, la grève générale se développe et des millions de grévistes paralysent la France, tandis que la Sorbonne et l'Odéon sont occupés sans réaction de la police. Seul aux commandes de l'État et de la majorité parlementaire, Pompidou paraît entre-temps devenu le vrai chef du pays.
A son retour anticipé de Roumanie le 18 au soir, de Gaulle déçoit jusqu'à des fidèles inconditionnels en apparaissant dépassé et flottant, sans cette vivacité et cette efficacité de réaction qui le caractérisent d'habitude. Il semble écartelé entre la prudence pompidolienne et la fermeté qu'il prêche lui-même. Il attend le 24 au soir pour parler en public, et pour n'annoncer des mesures déjà éventées depuis plusieurs jours, qui ne répondent à aucune préoccupation de l'heure. « J'ai mis à côté », confesse-t-il aussitôt après avoir visionné son allocution. Le Général expose, dans cette allocution, qu'il entend que l'État doit rétablir l'ordre, maintenir la République. « La rue, c'est le désordre, la menace du totalitarisme, “la chienlit” ». Le soir même, de violents incidents éclatent à Paris, on relèvera des centaines de blessés et plusieurs barricades érigées.
Le 26 mai, les accords de Grenelle passés entre le gouvernement Pompidou, les représentants des syndicats et du patronat aboutissent à un train de mesures classiques. De Gaulle préside le Conseil des ministres qui ratifie aussitôt les accords, mais à la surprise de Pompidou et des chefs syndicaux, la base rejette les avancées de Grenelle, estimant que c'est la société entière qui est en cause. Les grèves continuent. Le 27, une manifestation au stade Charléty lance l'idée d'un gouvernement provisoire. Le jour même, François Mitterrand reprend cette solution et annonce sa candidature à la présidence de la République. La crise politique atteint son sommet.
La disparition soudaine et inexpliquée du chef de l'État, parti avec son épouse en hélicoptère le 29 mai pour une destination inconnue, provoque la stupeur et ouvre la voie à toutes les supputations. Il passe par Baden-Baden, où il est reçu par le général Massu131. Dès son retour à Paris le lendemain, son allocution radiodiffusée a le ton de la fermeté. Il y annonce la dissolution de l'Assemblée nationale. Elle est suivie d'une immense manifestation organisée par les gaullistes sur les Champs-Élysées.



De Gaulle était prêt à accepter certaines des revendications des manifestants. Il voulut faire approuver les réformes par référendum mais Georges Pompidou, en mettant sa démission dans la balance, le persuada de plutôt dissoudre l'Assemblée nationale. De Gaulle l'annonça le 30 mai 1968, dans un discours radiodiffusé, comme l'appel du 18 Juin ou l'intervention de 1960 pendant les barricades d'Alger. Les phrases étaient courtes, chacune ou presque annonçait une décision :
« Étant le détenteur de la légitimité nationale et républicaine, j'ai envisagé, depuis vingt-quatre heures, toutes les éventualités, sans exception, qui me permettraient de la maintenir » ;
« J'ai pris mes résolutions. Dans les circonstances présentes, je ne me retirerai pas. » ;
« Je ne changerai pas le Premier ministre, qui mérite l'hommage de tous. » ;
« Je dissous aujourd'hui l'Assemblée nationale » ;
« Je charge les préfets, devenus ou redevenus Commissaires de la République, d'empêcher la subversion à tout moment et en tous lieux » ;
« Quant aux élections législatives, elles auront lieu dans les délais prévus par la Constitution, à moins qu'on entende bâillonner le peuple français tout entier, en l'empêchant de s'exprimer en même temps qu'on l'empêche de vivre, par les mêmes moyens qu'on empêche les étudiants d'étudier, les enseignants d'enseigner, les travailleurs de travailler. Ces moyens, ce sont l'intimidation, l'intoxication et la tyrannie exercées par des groupes organisés de longue date en conséquence et par un parti qui est une entreprise totalitaire, même s'il a déjà des rivaux à cet égard ». De Gaulle opposait ainsi le Parti communiste français aux groupes maoïstes, alors que le premier semblait déjà bien dépassé par les événements. En clouant le PCF au pilori et lui prêtant une visée subversive délibérée, de Gaulle rompt avec la stratégie de Pompidou, qui n'a cessé de négocier avec le Parti au long du mois.



La fin du discours mentionne au sujet d'une déclaration antérieure, et sans la citer, « l'ambition et la haine de politiciens au rancart » et affirme qu'après avoir été utilisés « ces personnages ne pèseraient pas plus que leur poids, qui ne serait pas lourd ». Mais le Général néglige les 44,5 % des voix qui se sont portées en 1965 sur Mitterrand au second tour de la présidentielle, ou encore le simple siège de sa majorité aux élections législatives de 1967.
Une manifestation fut organisée et fut créditée d'un million de participants selon les organisateurs, sept cent mille selon la préfecture de police. Les élections de juin 1968 furent un grand succès pour la droite qui obtient 354 des 487 sièges (du jamais vu dans l'histoire du parlementarisme français). Georges Pompidou fut remplacé par Maurice Couve de Murville au mois de juillet.
La campagne des législatives occupa les forces politiques, tandis que la reprise du travail se faisait progressivement. La reprise en main, autoritaire, se fait parfois sans ménagement. Des Comités d'action civique, répondant à l'appel de De Gaulle, se constituent pour dresser des listes noires de grévistes et d'agitateurs notoires, et la police même renoue avec la brutalité des premiers jours de mai (quatre morts à déplorer en juin 1968). Cependant, de Gaulle bénéficie de la lassitude d'une opinion qui après avoir manifesté jusque fin mai sa sympathie majoritaire pour les révoltés, commence à se fatiguer de l'absence de perspectives du mouvement.
Les élections n'ont pourtant pas assez redynamisé le pouvoir. L'Assemblée nationale, plus à droite, est aussi plus frileuse face aux réformes pourtant nécessaires (participation, régionalisation, réforme de l'Université…). L'éviction du vrai vainqueur de la crise, Pompidou, a été mal comprise, et ce dernier fait désormais figure de recours et de successeur potentiel. De Gaulle n'est plus irremplaçable.