samedi 8 août 2015

Pèlerinage à Colombey-les-Deux-Eglises


Ce petit village haut-marnais, d’environ 400 habitants, est dominé par sa Croix de Lorraine sur « la Montage » à 397 m d’altitude. Dans un texte de 1108, écrit en latin, « Colobarium ubi sunt duae ecclesiase », on voit le village désigné COLOMBEY OU SONT DEUX EGLISES.


Il ressort qu’il existait bien deux églises dans ce village, l’église paroissiale et le prieuré :
* l’église paroissiale « Notre Dame en son Assomption » est classée monument historique pour le chœur, l’abside et les chapelles latérales. Cette église, d’une grande simplicité, reflète bien l’état d’esprit du lieu.
* le prieuré du titre de « Saint Jean-Baptiste », de l’ordre de Cluny, avait été fondé par Guy II ou Gui III de Vignory, seigneur de Colombey, à la fin du XIème et au début du XIIème siècle.


A la Révolution le nom de Colombey avait été transformé en « Colombey la Montagne », apparu dans les registres de l’état civil pour la première fois de décadi 20 du mois de pluviôse An III et disparu en l’An X, pour reprendre le nom de « Colombey les deux Eglises ».

Charles André Joseph Marie de GAULLE est né à Lille le 22 novembre 1890, et a acheté la Boisserie en 1934. Selon le plan cadastral, la propriété appartenait en 1818 à M. Bourlon et en 1843, Charles Cuny, brasseur à Bar-sur-Aube, y créa une « brasserie ». C’est Henri Descaves, nouveau propriétaire, qui en 1881, la transforme en maison d’habitation et lui donna le nom de « Boisserie ».

Le Général de Gaulle choisit de s’installer à Colombey-les-Deux-Eglises, village de Haute-Marne, parce que les paysages austères de landes et de forêts de cette campagne, à la saignée des provinces de Champagne, de Lorraine et de Bourgogne, fragments de la France éternelle, correspondaient à son esprit et à son cœur, mais aussi en raison de son climat et de son environnement convenant à sa petite fille, Anne, malade, qui repose au cimetière de Colombey-les-Deux-Eglises depuis 1948.

Jamais un lieu n’aura été aussi inséparable d’un homme, que Colombey-les-Deux-Eglises du Général de GAULLE. Colombey fut sa vraie, sa seule demeure. C’est là que le Général de Gaulle s’est retiré en 1946. « Sur ma maison » a-t-il alors écrit, « je regarde tomber le dernier soir d’une longue solitude. Quelle est donc cette force des choses qui m’oblige à m’en arracher ? ».


Suite à l’échec du référendum du 27 avril 1969, il donna sa démission au gouvernement et rentra définitivement à Colombey-les-Deux-Eglises. Le Général de Gaulle vit pour la dernière fois les paysages qu’il aimait tant le 9 novembre 1970. Il repose à côté de sa fille Anne au cimetière de Colombey-les-Deux-Eglises. Son épouse, Yvonne de Gaulle née Vendroux, les rejoindra quelques années plus tard.

Citroën DS 19 – 1958. Le 22 août 1962, aux environs de 20 heures, deux Citroën DS 19 banalisées et escortées de deux motards quittent le palais de l’Elysée vers la base aérienne de Villacoublay pour prendre un hélicoptère à destination de Colombey-les-Deux-Eglises. A bord de la seconde, Charles de Gaulle, de retour d’un Conseil des ministres, son épouse Yvonne : le Colonel Alain de Boissieu, gendre et aide de camp du président est quant à lui assis à côté du chauffeur, le gendarme Marroux.

Alors que le cortège, roulant en direction de Vélizy-Villacoublay où attend l’hélicoptère présidentiel, arrive à hauteur du rond-point de Clamart – lieu-dit du Petit Clamart -, le commando Bastien-Thierry, dissimulé en guet-apens dans une Renault Estafette, ouvre le feu sur la DS présidentielle. Ignorant que les pneumatiques du véhicule présidentiel sont à l’épreuve des balles, les assassins tirent à hauteur des roues sans succès à l’exception de l’un d’eux, Georges Watin, qui envoie une rafale de MAT 49 à l’arrière de la voiture où sont assis Charles de Gaulle et son épouse. Anticipant l’assaut de justesse, Boissieu crie aux de Gaulle de se baisser ce qui leur évite d’être touchés.

Sur les 150 balles tirées par le commando, seuls les huit impacts de Watin seront identifiés sur la DS. Réalisant l’échec de l’attaque, Gérard Buisines tente d’éperonner la DS avec l’Estafette tandis qu’à ses côtés Alain de la Tocnaye par-delà la portière tente de mitrailler la DS quand son arme s’enraye. Par un concours de circonstances, le chef de l’Etat et son épouse survivent à la tentative d’assassinat et bientôt les terroristes seront arrêtés et déférés devant un tribunal d’exception.

Renault Rambler Ambassador 1962. Le modèle présenté a été offert par la régie Renault au général de Gaulle, Président de la République en 1962. Immatriculé 6 PR 75, le véhicule a été carrossé par Henri Charpon, blindé et doré de pneus anti-crevaisons, il aurait été peu utilisé par le Général.


Les Renault Rambler sont des automobiles conçues par American Motors Corporation et étaient assemblées par Renault dans son usine de Haren, en Belgique, entre 1962 et 1967. Les voitures étaient envoyées sous forme de pièces détachées des Etats-Unis et assemblées dans l’usine Renault. D’autres Rambler Renault, les Classic et Ambassador, ont été produites par IKA Renault en Argentine dans l’usine Santa-Isabel de Cordoba jusqu’en 1972.


A l’issue de l’attentat du PC, Roger Frey, ministre de l’intérieur de mai 1961 à avril 1967 a commandé sans prévenir de Gaulle, la Rambler, qui a été faite à la taille de de Gaulle. Il a toujours refusé de l’utiliser car c’était une voiture étrangère et qu’elle était blindée. Pour la petite histoire, d’après Martial Goult, de Gaulle du haut du perron de l’Elysée face à la Rambler se serait écrié : « où est ma DS ? » et s’adressant à Roger Frey, aurait dit : « ceux qui l’ont commandée n’ont qu’à la payer et le garder ! ». De l’humour gaullien !

Un homme, un paysage. Charles de Gaulle n’est pas né à Colombey-les-Deux-Eglises : c’est à l’âge adulte qu’il a choisi de venir s’installer ici. Un peu par hasard, mais pas seulement : quelque chose, dans les paysages environnants, l’attira immédiatement. Combien de fois s’est-il promené dans cette campagne qui lui inspira des textes magnifiques ? Combien de fois, dans le désarroi de l’Histoire, a-t-il trouvé à Colombey le calme  et la force nécessaires à la poursuite de son œuvre ?

Entre de Gaulle et Colombey, un lien étroit s’est tissé. La beauté un peu âpre des grands horizons s’accorde parfaitement au caractère austère du personnage, tandis que les petits villages nichés dans les vallées rappellent l’éternité d’une France à laquelle Charles de Gaulle croyait éperdument.

La famille. Charles de Gaulle naît le 22 novembre 1890 à Lille dans la maison de ses grands-parents maternels. Il grandit à Paris, dans une famille de la petite aristocratie peu fortunée, auprès d’une mère qu’il admire, et dont la photographie nous révèle tout le tempérament. Le père, Henri de Gaulle, homme érudit et pétillant, est professeur. La famille, avec ses cinq enfants, vit assez simplement dans un appartement de six pièces. C’est dans les jardins de la capitale que le petit Charles, vêtu de son costume marin, joue au ballon. Le dimanche est l’occasion de grandes promenades près de Paris, tandis que les vacances offrent le dépaysement dans le Nord ou en Dordogne.

Dans la France de la belle époque, Charles de Gaulle est un petit garçon presque comme les autres : il acquiert une solide éducation au sein de sa famille, développe sa culture sur les bancs de l’école, joue aux petits soldats et rêve d’être général ou ministre de la Guerre… « Vous savez, confiera sa sœur, Charles a gardé un merveilleux souvenir de son enfance, et pourtant nous n’étions pas gâtés »… Au fur et à mesure qu’il grandit, Charles puise dans son milieu les valeurs qui fonderont son action future : le patriotisme de son père et la foi catholique de sa mère  en sont les éléments principaux. Ajoutez-y un peu de fierté, voire du sale caractère, un goût prononcé pour la littérature et les idées, et vous obtiendrez un futur général de Gaulle. Dernier ingrédient indispensable : la taille, qui se doit d’être haute.

Lorsqu’il achète la Boisserie en 1934, Charles de Gaulle veut offrir aux siens un point d’ancrage dans le flot de déménagements imposés par la vie militaire. Il pense aussi à sa petite Anne, qui a besoin d’un jardin abrité des regards indiscrets. La Boisserie sera ce havre tant espéré. Le vaste paysage et le petit village tranquille de Colombey ont séduit l’officier. Et la localisation de la maison, à mi-chemin entre Paris et les garnisons, de l’Est où il est appelé à servir, s’avère fort pratique. Jusqu’en 1940, les de Gaulle ne passent pas à la Boisserie que les vacances d’été. Elle ne deviendra leur résidence principale qu’après 1946. Pourtant, dès l’entre-deux-guerres, c’est là qu’ils se retrouvent en famille, voient grandir leurs enfants, qu’ils trouvent le repos et, finalement, enracinent leur destin. En 1948, lorsqu’ils décident d’enterrer leur fille Anne dans le cimetière de Colombey, ils marquent le lien étroit qui les unit désormais à cette terre.

Philippe de Gaulle est l’aîné des enfants de Charles et Yvonne de Gaulle. Il passa ses vacances d’été à la Boisserie de 1934 à 1939, puis y  revint régulièrement pour rendre visite à ses parents. L’amiral Philippe de Gaulle est aujourd’hui propriétaire de la Boisserie.

Geneviève de Gaulle est l’une des nièces de Charles de Gaulle – son père est Xavier de Gaulle, frère aîné du Général. Résistante, déportée, elle fut une proche confidente du Général au moment de la Libération et vint à plusieurs reprises séjourner à la Boisserie.


« Ce sera lui ou personne ! » - La rencontre entre le capitaine de Gaulle et Yvonne Vendroux relève de l’arrangement bourgeois et d’une profonde attraction réciproque. Après la guerre, le capitaine est en mission en Pologne. Lors d’une permission à Paris durant l’automne 1920, il rencontre chez des relations communes une jeune fille de 20 ans, Yvonne Vendroux, issue d’une famille calaisienne connue et respectée. La sympathie réciproque se noue autour d’une tasse de thé et d’une visite au Grand Palais. Les deux familles partagent visiblement les mêmes valeurs traditionnelles. Avant le retour à Varsovie, les évènements se précipitent : on parle fiançailles, et engagement solennel pour l’année suivante. Le mariage civil a donc lieu le 6 avril 1921 et le mariage religieux le lendemain en l’église Notre-Dame-de-Calais. La tradition est respectée, mais l’amour et l’estime font de ce jeune couple un modèle d’une rare solidité.

 

mardi 4 août 2015

le château de Lourmarin et les Vaudois; visite du 30 juin 2015



Louis d’Agoult-Montauban, fils et héritier de Louise, fut à partir de 1452, l’initiateur du Château neuf. Implanté sur le rocher, à l’ouest et en contre-haut de deux étages par rapport au Château vieux, le nouvel édifice contredit et cherche à supplanter l’ancien, en adoptant le site et l’apparence d’un château fort.

Le bâtiment réalisé devait, en effet servir d’amorce à la constitution d’un grand quadrilatère cantonné de tours rondes, selon un type inauguré en Provence au 14ème siècle et resté en vogue jusqu’au 17ème siècle.
La construction paraît avoir été interrompue, peut-être ruinée, lors de l’invasion de l’armée de Charles Quint en 1536. Il en reste le mur nord entier et un fragment du mur sud. Les croisés, très proches encore par leur décor de celles du Château vieux, s’intègrent ici dans les travées régulières.


De la loggia, on voit les trois niveaux de galeries à l’italienne. Dans la petite forteresse médiévale, le corps de logis est à trois niveaux et l’escalier à vis donne accès aux galeries. Les salles qui donnent sur la cour abritent aujourd’hui les bibliothèques.


Au premier étage, dit « étage noble » car il comprenait les salons et salle à manger du seigneur, la loggia présente des soutiens en pierre, colonnettes et arcades en anse de panier. Aux deuxième et troisième étages, deux galeries plus légères, en bois, révèlent l’influence des Vaudois originaires du Piémont. De telles galeries se retrouvent dans les châteaux piémontais du 15ème siècle et dans ceux du Val d’Aoste. Elles ont été restituées lors de la restauration entreprise par Robert Laurent-Vibert. L’ensemble dessert les anciens appartements du Château vieux qui abritent à présent les bibliothèques de la Fondation. La toiture du bâtiment déborde largement au-dessus d’une cour fermée, autre influence piémontaise.


Dans la cour se trouvaient les communs. Au rez-de-chaussée, un ensemble de salles voûtées comprenant la cuisine et la boulangerie ainsi que des salles de réserves et une prison (avec judas). Contre le mur qui fermait et protégeait le bâtiment se trouve encore une partie de la fontaine du château, permettant ainsi aux voyageurs et pèlerins de pouvoir se désaltérer. Une inscription en lettres gothiques sur un linteau de porte datée de 1513, indique en forme d’avertissement « Bois et t’en vas » : les seigneurs du lieu ne tenaient pas à ce que l’on s’attardât dans leur château !


La cour : en bas, il y a deux grandes salles voûtées : la boulangerie et la cuisine où la nourriture et le vin étaient stockés. On voit l’ancienne prison avec un judas pour surveiller les prisonniers. Au-dessus de cette porte, il y  a une accolade sculptée dans la pierre, un décors du Moyen-Age.
La tour hexagonale abrite un escalier à vis desservant les quatre niveaux du château. Au sommet de la tour et sous ses créneaux, se trouvent des gargouilles représentant des chiens, mastiffs ou mâtins, utilisés pour la chasse aux loups, nombreux au 15ème siècle dans le Luberon.


La tour défensive à six côtés (hexagonale) : en haut de la tour, les trois gargouilles en forme de chiens sauvages, chasseurs de loup. Grâce à des trous dans la gueule des animaux, elles laissent s’écouler l’eau de pluie. Au Moyen-Age les gens pensaient qu’elles protégeaient des mauvais esprits.
L’escalier à vis : à l’époque médiévale, les escaliers tournaient toujours dans le sens des aiguilles d’une montre. En effet, lorsque les chevaliers attaquaient la tour, tenant leur épée de la main droite, ils étaient par le pilier central.


Les Vaudois. Ils étaient les disciples de Pierre Vaudès (ou Valdo), un riche marchand lyonnais qui ainsi que le fera François d’Assise, avait distribué ses biens, aux pauvres et tout quitté à la Pentecôte 1173 pour partir sur les routes prêcher un Evangile libéré des contraintes d’une église plus tournée vers le pouvoir temporel que vers la charité chrétienne. Ce mouvement s’était dans un premier temps développé dans la région lyonnaise.

L’Inquisition le considéra comme hérétique. Les persécutions qui suivirent obligèrent les vaudois à se réfugier dans les vallées alpines (région d’Embrun, Briançon et piémont italien) où ils s’installèrent durablement, aussi bien du côté français que du côté italien.

Tout en demeurant au sein du catholicisme, ils développaient une foi et une pratique reposant essentiellement sur la lecture de la Bible mise à la portée de tous, c’est-à-dire traduite dans la langue maternelle. Ce qui les opposait à Rome qui ne reconnaissait que la Bible en latin, la Vulgate.

Pour se soigner, ils préféraient l’utilisation des plantes médicinales plutôt que d’invoquer les saints guérisseurs. Ils étaient contre la peine de mort et remettaient en question le pouvoir ecclésiastique. Ils refusaient la confession tout comme l’existence du Purgatoire, car il n’était pas mentionné dans la Bible.

Le savoir accumulé au fil des générations leur avait permis une maîtrise de la mise en valeur des terres incultes en particulier en développant l’irrigation. Du coup, après qu’épidémies et guerres eurent dépeuplé la Provence, la noblesse les fit venir des vallées alpines aux environs de 1475 pour Lourmarin, pour remettre en valeur des terres devenues stériles. Il faut souligner que lors de leur installation en Lubéron les seigneurs leur laissèrent la liberté de pratiquer leur culte.


En ce début du XVIème siècle, les idées réformatrices de Luther et de Calvin allaient leur chemin. En 1532, lors d’un rassemblement dans les Alpes du sud versant italien, à Chanforan, la communauté vaudoise décida de se rallier à la Réforme en raison de parentés existant entre leurs pratiques et les pratiques protestantes, notamment la proximité avec les textes bibliques.

Le roi François Ier signe en 1540 l’Edit de Fontainebleau, premier texte de proscription contre les Protestants. Cet édit sera appliqué contre les Vaudois avec une rigueur extrême que le texte ne prévoyait pas, par le Parlement de Provence et son Président Jean Meynier d’Oppède.

Le massacre.
Du 14 au 21 avril 1545, la semaine sanglante vit incendier et détruire vingt deux villages du Lubéron et de ses alentours par les troupes de Jean MAYNIER d’OPPEDE. Les habitants n’ayant pu s’enfuir furent brûlés, emmenés aux galères furent massacrés sur place.


Le déchaînement des violences fut inouï : les assaillants détruiirent les villages et s’en prirent aussi aux cultures : ils arrachaient les vignes, comblaient, comblaient les puits, coupaient les arbres fruitiers, détruisaient les fontaines, piétinaient les jardins. Ils violèrent les femmes, tuèrent les enfants. Les hommes jugés trop vieux ou trop jeunes pour les galères furent massacrés sur place.

Blanche Levis-Ventadour, dame de Lourmarin, s’insurgea contre ces massacres et la perte de la plus grande partie de ses paysans.  Elle porta plainte auprès de François 1er contre Jean Meynier d’Oppède l’organisateur de ce désastre et obtint sa condamnation par le Parlement de Paris.


Le Château de Lourmarin et les Vaudois.
Le Château de Lourmarin est intimement associé aux Vaudois. Tout d’abord ils le construisirent quand Foulques d’AGOULT les fit venir à Lourmarin dans les années 1470. En échange, Foulques leur attribua un lopin de terre et une maison dans le village alors abandonné. Ils édifièrent le Château vieux dans le style des châteaux et demeurs des Alpes du sud, leur région d’origine. Les descendants de ces premiers vaudois ont aussi construit l’Aile Renaissance pour Blanche Levis-Ventadour, épouse de Louis d’Agoult.

Pendant la semaine sanglante de 1545, Jean Meynier d’Oppède attaque le château avec ses troupes. On peut encore voir les meurtrières faites en hâte dans les murs de la tour Renaissance par les Vaudois qui s’y réfugièrent et essayèrent en vain de se défendre. La plupart d’entre eux fut massacrée.

Les Vaudois qui échappèrent à cette extermination se réfugièrent à l’étarnger ou se terrèrent en attendant les jours meilleurs qu’apportera l’application de l’Edit de Nantes pris par Henri IV en 1598. A Lourmarin, les souvenirs des Vaudois est vivace et aujourd’hui encore nombre de ses habitants se déclarent toujours descendants de Vaudois. La présence du Temple protestant atteste cette continuité.
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Dans une salle du deuxième étage, on peut s’instruire  en visitant l’exposition sur la Grande Guerre : PREMIER CONFLIT MONDIAL (Grande Guerre) 1914-1918.

L’inventivité des simples soldats. Lorsqu’à l’automne 1914 la guerre de mouvement prend la forme inattendue d’une gigantesque guerre de siège, se fait jour la nécessité d’atteindre un ennemi dorénavant enterré. Car le rôle de l’artillerie de campagne à tir tendu décroît tandis que s’imposent les mortiers à tir courbe capables d’atteindre le fond des tranchées (le tir plein fouet ne peut atteindre les troupes abritées). Or, en 1914 , sauf en Allemagne, les mortiers ne sont plus en dotation dans les armées…

Chez les Belges, Britanniques et Français une étonnante artillerie de tranchée naît alors d’initiatives individuelles et de réalisations locales qui témoignent de l’inventivité de simples soldats appliquant tout leur savoir-faire artisanal à la fabrication de lance-bombes.  

La TRANCHéE. Guillaume APOLLINAIRE
Je suis la blanche tranchée au corps creux
… Et j’habite toute la terre dévastée
Viens avec moi pénètre-moi pour que je sois heureuse de volupté sanglante
Je guérirai tes peines tes soucis tes désirs ta mélancolie…
Avec la chanson fine et nette des balles et l’orchestre d’artillerie…
Couche-toi dans mon sein comme sur un ventre bien aimé
Je veux te donner un amour sans second sans sommeil sans paroles
J’ai tant aimé de jeunes gens…
Je les ai aimés ils sont morts et je n’aime que les vivants
Allons viens dans mon sexe plus long que le plus long serpent long comme tous les corps des morts mis l’un devant l’autre
Viens ceux qui m’aiment sont là armés de fusils de crapuoillots de bombes…

150 ANS D’ART DES TRANCHéES présentés en 250 œuvres-types de la collection Becker.
La vie des soldats au front ne se résumait pas à combattre, à mourir ou à vaincre. Pour calmer angoisses et peurs, pour faire face à la désespérance et à l’ennui précédant l’action guerrière, ils ont produit et produisent toujours, bijoux, chansons, dessins, journaux, maquettes, objets décoratifs ou utilitaires, peintures, poésies, romans et théâtre. C’est ainsi qu’est né et de poursuit l’Art des ranchées, défini comme la dénomination générique des objets fabriqués par des soldats, des prisonniers ou des civils à partir du matériel de guerre ou de tout autre matériel, pourvu que ces objets soient associés à un conflit armé ou à ses conséquences.

Les œuvres ici présentées montrent comment, dans la rude réalité de la vie au front, les soldats donnent une mémoire et un sens à leur expérience de guerre et font face à l’épreuve des angoisses, des blessures, des maladies, de la peur et de la mort. Ces œuvres expliquent comment les combattants s’accomodent de la vie des bunkers et tranchées grâce à des créations forgées à partir de leurs identités civiles d’avant-guerre, identités qu’ils ont su adapter pour tenir compte de la réalité de la vie en temps de guerre et pour prouver à leurs proches de l’arrière qu’ils ne les oubliaient pas quoi qu’il advienne.

Pour réaliser leurs œuvres, les combattants se réunissent le plus souvent en petits groupes solidaires partageant finances, matières premières, outillage, travail et savoir-faire. Comme dans le cas des « popottes » formées autour de l’amélioration de la nourriture de base, il s’agit de groupes restreints de trois à quatre combattants partageant tout. Formés sur la base d’affinités électives et de capacités complémentaires, ces groupes voient naître de forts sentiments d’amitié construits dans l’épreuve. Ils constituent des cellules d’entraide psychologique où chacun trouve un réconfort moral et un ersatz de vie familiale.

On limite souvent l’Art des tranchées à la période qui s’étend de la Guerre russo-japonaise de 1904/1905 à la fin de la Grande Guerre, en 1919. Mais telle n’est pas la réalité des faits. Les fouilles d’Alésia n’ont-elles pas livré des objets à finalité religieuse qui auraient pu être fabriqués au cours du fameux siège de 42 ? Les sièges des forteresses du Moyen-Age ne virent-ils pas se faire nombre d’ex-voto surprenants ?

Par ailleurs, l’Art des tranchées ne se limite pas aux pays occidentaux « développés ». C’est un art universel comme en témoignent les magnifiques panneaux relatant le siège d’Adwa (Ethiopie – 1896). Sont évoqués ici différents belligérants, divers conflits, plusieurs grades, matériels et positions sociales.

Cette exposition ne concerne pas l’histoire militaire. Elle n’est qu’une très modeste approche de l’ethnographie des combattants exprimée au travers de productions faites toujours de peu : peu de matériaux, peu d’outils, peu de temps. Elle néglige les productions d’artistes professionnels réalisés dans les ateliers de camouflage. Les œuvres les plus maladroites ou cabossées ont souvent été faites en première ligne, les plus élaborées furent produites dans les voitures atelier de deuxième ligne où l’on répare les armes.                                         Alain BECKER.