Pointe
Saint-Mathieu – Jusqu’au bout de l’ancien monde.
« Toute cette côte est un cimetière. […] [C]’est la
limite extrême, la pointe, la proue de l’ancien monde. Là, les deux ennemis
sont en face, la terre et la mer, l’homme et la nature », écrivait Jules
Michelet. Suprême défi, cette « côte funèbre » serait aussi le terme
de l’extraordinaire voyage de l’apôtre Mathieu.
La pointe du Finistère, sur le territoire de Plougonvelin,
en bas Léon, la falaise déchiquetée et couverte de landes de la pointe Saint-Mathieu,
battue par les vents et fouettée par les flots, porte un phare, un sémaphore,
le mémorial national aux marins morts pour la France, et les vestiges d’une
abbaye bénédictine du bout du monde, Saint-Mathieu de Fine-Terre.
De l’église abbatiale, construite au XIe siècle,
plusieurs fois ravagée et maintes fois remaniée jusqu’à la fin du XVe
siècle, subsistent des murs romans et gothiques connotés d’influences
Plantagenêt et normandes. Un pardon s’y déroule encore dans la nef à ciel
ouvert ; il puise ses origines dans un récit aussi ancien que légendaire.
Le crime de saint
Tanguy. La tradition assure que, au VIe siècle, la pointe
Saint-Mathieu était la terre de Tanguy, fils du seigneur de Trémazan. Ce prince
guerrier, formé à la cour de Childebert, est dupé par sa marâtre à son retour
dans la maison paternelle, et décapite sa propre sœur Haude, accusée de
débauche, pour laver l’honneur de la famille. Or, sous ses yeux horrifiés,
Haude prend sa tête entre ses mains et clame son innocence. Tanguy se repentira
toute sa vie. Il rejoint saint Pol Aurélien, puis fonde l’abbaye Saint-Mathieu
de Fine-Terre. Il y sera inhumé et son tombeau fera très tôt l’objet d’un culte
populaire, associé à celui de sainte Haude.
De l’Egypte à la
Bretagne. Trois siècles plus tard, des navigateurs du Léon partent en
expédition pour l’Egypte pour soustraire aux infidèles le corps de saint
Mathieu, apôtre et évangéliste, et, dit-on, évangélisateur de l’Ethiopie, où il
serait mort en martyre. Saint Mathieu lui-même les aurait priés de rapporter sa
dépouille en terre chrétienne. Au retour d’un périple qui aura duré trois ans,
ils sont sur le point de faire naufrage à la pointe de la Bretagne quand le
rocher qu’ils allaient heurter s’ouvre en deux pour leur frayer un passage.
C’est ainsi que les restes de saint Mathieu vont pouvoir reposer dans
l’abbatiale qui lui est consacrée, au moins pendant quelque temps. Car, à la
fin du Xe siècle, les Normands détruisent l’abbaye, dérobent la
précieuse relique et l’emportent dans le sud de la péninsule italienne, à
Salerne, où on lui a construit un tombeau et, au-dessus une cathédrale.
Cependant, Hervé 1er, vicomte de Léon, rapportera sa tête à la
pointe Saint-Mathieu en 1206. Ce crâne y sera conservé et vénéré jusqu’à la
Révolution.
Sur le promontoire le plus occidental de l’Europe
septentrionale et continentale, le chef de saint Mathieu fait donc écho à celui
de sainte Haude. Le voyage miraculeux de l’apôtre ou celui de saint Jacques,
dont on assure à Locquirec qu’il s’est échoué dans la baie de Morlaix et non
pas à Compostelle, semblent être les versions bretonnes de ces épopées
irlandaises dont les héros mythiques voguent à la recherche de la Terre promise
de l’autre monde. « Ici se termine l’ancien monde, écrit Flaubert, à la
pointe Saint-Mathieu ; voilà son point le plus avancé, « sa limite
extrême ». Derrière vous est toute l’Europe, toute l’Asie ; devant
vous, c’est la mer et toute la mer. »
---------------------------------
-----------------------------------
« Rien
de sinistre et de formidable comme cette côte de Brest ; c’est la limite
extrême, la pointe, la proue de l’ancien monde […] L’écume vole jusqu’à
l’église où les mères et les sœurs sont prière » - Jules Michelet.
POINTE
SAINT-MATHIEU.
Abbaye de
Saint-Mathieu. Selon la légende, l’abbaye dont il ne subsiste
aujourd’hui que des ruines et qui porte le nom de Saint-Mathieu-Fin-de-Terre
(Loc Mazé Penn ar Bed) aurait été fondée au VIème siècle par Tanguy,
en expiation du meurtre de sa sœur Heude. Cette histoire merveilleuse commence
au château de Trémazan, où le fils du seigneur des lieux, Guirguy, influencé
par les médisances de sa belle-mère, tue sa sœur.
Guirguy se rend alors auprès de l’évêque du Léon, Paul
Aurélien à qui il demande de fixer sa pénitence. Celui-ci le rebaptise Tanguy
(Tan « le feu ») et fait de lui l’abbé du Relec.
De son côté, son père lui cède des terres lui appartenant au
cap de Penn ar Bed (le bout du monde). Là, quelques années après, ému par le miracle de marins sauvés d’un naufrage
grâce aux reliques de saint Mathieu qu’ils transportaient, Tanguy fit
construire un monastère à la gloire de l’apôtre. En réalité l’abbaye date
probablement du XIème siècle.
Pillée de multiples fois, particulièrement en 1558 par les
Anglais et les Hollandais, elle fut rapidement restaurée grâce à l’abbé Claude
Dodieu. Elle fut ensuite occupée à partir de 1655 par les Bénédictins réformés
de Saint-Maur. En 1790, pendant la Révolution, les quatre derniers moines
partirent. Livrée au pillage, elle fut ensuite démolie pour vendre les pierres.
La chapelle voisine NOTRE-DAME-de-GRACE, restaurée en 1861, abrite quelques statues
dont celle de Tanguy armé de l’épée qui ta sa sœur.
Gibet des moines.
Ce nom, donné improprement à deux stèles christianisées, rappelle que les
moines de Saint-Mathieu disposaient du droit de haute justice.
Phare de Saint-Mathieu. L’ancienne « tour à feux »,
entretenue par la Marine à partir de Louis XIV, a été remplacée en 1773 par une
lanterne vitrée contenant douze lampes à huile et miroirs d’une portée d’une
dizaine de kilomètres. Le phare actuel, qui se visite, s’élève à 25 m au-dessus
du sol et 54 m au-dessus du niveau de la mer. Il date de 1835 m et sa portée
lumineuse est de 52 km.
De l’abbaye au phare. « Votre imagination vous
permettra de vous représenter l’existence de ces bénédictins de la Pointe
Saint-Mathieu, Bretons, Irlandais et Gallois, bêchant toute la journée leurs champs rocailleux, et,
dès la tombée de la nuit, éclairant bénévolement, uniquement parce qu’il faut
aider son prochain, les navigateurs et les pêcheurs déjà nombreux à cette
époque. » Louis Le Cunff – Feux de
mer, 1957
Un coin que j'adore et une belle route tournante pour les motards.Je découvre un km 0 du chemin de st Jacques de Compostelle. Le Conquet ,de vieux souvenirs ,on y allait très souvent avec mes parents .J'ai même campé pas très loin à Berthaume.
RépondreSupprimerKenavo ar vechal.