3 - A
la limite de la Vendée et de la Loire-Atlantique, le Port du Collet séparant au
nord la commune de Moutiers-en-Retz et au sud Bouin, est un port ostréicole sur
la rivière du Falleron. Avec ses pontons en bois, parfois à deux niveaux et les
cabanes de pêcheurs le long du quai ce petit port de pêche et de plaisance
situé au milieu des marais ne manque pas de charme.
4 - Il
est préférable d'attendre de fortes pluies pour partir à la pêche à la civelle.
Avec une eau troublée, elle n'en sera que plus facile à attraper. La pêche en
bateau utilise un procédé appelé le drossage : il s'agit de déployer deux grand
filets d'un mètre à contre-courant pour filtrer l'eau et retirer un grand
nombre de civelles.
5 - Autrefois grand exportateur de sel, le port est aujourd’hui réputé pour son ostréiculture et attire grand nombre de pêcheurs à la ligne qui viennent y appâter anguilles et mulets. Son côté pittoresque ne vous échappera pas, tout comme sa passerelle d’ailleurs, qui symbolise l’emplacement de l’ancienne écluse !
6 - Lorsque les civelles arrivent en Europe, les marées les poussent dans les estuaires, elles sont donc pêchées près des rives, généralement la nuit et par un temps doux. On peut également les attraper depuis un bateau, au large des côtes de l'Atlantique. Cependant, cette pêche est exclusivement réservée aux professionnels, soumis à des contraintes très strictes.
7 - La pêche à la civelle dans le port du Collet où les
patrons-pêcheurs connaissent bien leur métier commencé généralement à l’âge de
16 ans. Ils sont six professionnels ayant un droit de pêche des civelles dans
ce petit port, niché entre Loire-Atlantique et Vendée. La saison de la pêche à
la civelle débute le 1er décembre chaque année. Au terme de son incroyable
épopée à travers l'océan Atlantique, la civelle née en Mer des Sargasses arrive
sur nos côtes entre la fin du mois d'octobre et le début du mois de mai. La
période la plus favorable est le début de l'année, en janvier et février.
8 - C'est le nouvel "ivoire blanc". La civelle,
espèce menacée dont la pêche est soumise à des quotas drastiques en France. La
civelle est un douloureux sujet qui chaque année nous amène à de multiples
débats. Malheureusement sans que l'espèce anguille y trouve son compte. La
civelle c'est l'alevin de l'anguille appelé « pibale » en Charentais. C'est ni
plus ni moins que le fruit de la reproduction de l'anguille dont les plus gros
effectifs arrivent sur nos côtes à la fin de l'automne après un très long
périple puisqu'elle est naît au large de la Floride dans la mer des sargasses.
9 - En France nous sommes les rois de la dérogation. Il faut
retracer l'historique de cette autorisation qui date aujourd'hui de plusieurs
décennies. Il y a plus de cinquante ans les ostréiculteurs ont connu
d'importantes mortalités sur les huîtres. Pour compenser ce manque à gagner,
l'Etat français les a autorisés à pêcher la civelle et surtout à vendre le
produit de cette pêche. Cette dérogation ne devait être que ponctuelle et
surtout devait cesser au moment où les huîtres avaient retrouvé la santé.
Seulement voilà cette pratique s'est instituée et en 2021 on pêche toujours ces
bébés anguille pour les vendre. Ces pêcheurs ne sont donc pas en infraction
Jacques puisque cette pratique est autorisée en mer comme en rivière du 15
novembre au 15 avril. Elle est malgré tout très encadrée avec des déclarations
de capture obligatoires et surtout des quotas à respecter.
10 - Au tout début aux environs des années 2009, 2010 ce
quota était de 75 tonnes dont 40 tonnes rachetées par l'Etat. 5 ou 6 ans plus
tard il a été revu à la baisse avec un maximum de 65 tonnes pour cette saison
2020 -2021 il plafonne à 57,5 tonnes. 40 tonnes de civelle sont rachetées par
l'Etat à plus ou moins 350 euros le KG. En gros 14 millions d'euros. Accorder
un quota de 57 ou 65 tonnes sur une espèce menacée d'extinction ce n'est pas
sérieux. Il faut savoir qu'en octobre ou novembre lorsque les civelles arrivent
sur nos côtes, elles sont approximativement 4000 / kg. Multipliez 65000 kg par
4000 et vous découvrirez le nombre astronomique que ça représente. Ensuite que
l'Etat rachète ces alevins pour repeupler les eaux douces ce n'est pas vraiment
rationnel.
11 - Malgré le classement récent de l'anguille en liste
rouge de l'UICN, et de nombreux aménagements destinés à faciliter ses
migrations, l'espèce est en forte régression. Les populations de l'anguille
d'Europe se sont effondrées en une trentaine d'années, au point que l'anguille,
qui était l'un des poissons les plus communs jusque dans les années 1970 (alors
que la plupart des barrages étaient déjà construits) est devenue une espèce en
voie d'extinction et classée vulnérable par l'UICN et l'Union européenne. En
France la population a diminué de 75% en 30 ans.
Plusieurs causes sont pointées, qui sans doute cumulent
leurs effets (avec même de possibles effets synergiques) :
- la pêche trop intensive
qui dans la seconde moitié du XXe siècle a atteint le stade de la «
surpêche » ; aujourd'hui, la mise en œuvre du PGA français, a conduit à
réduire la pression exercée par la pêche professionnelle (division par 2
des effectifs en 10 ans), mais pas celle exercée par la pêche amateur de
loisir (aucune donnée sur les stades adultes pêchés n'est fournie par ces
acteurs pourtant gestionnaires des milieux aquatiques).
- le braconnage (une civelle
sur dix serait pêchée illégalement) ;
- les importants lâchers
d'eau douce suscités par les grands barrages hydroélectriques ;
- .../...
.../...
- la pollution chimique car
l'anguille est un poisson gras qui accumule de nombreux polluants solubles
dans les graisses (pesticides, dioxines, furanes et PCB en particulier).
Elle se nourrit volontiers dans les sédiments qui au fil des années ont
accumulé des métaux lourds, des pesticides et de nombreux autres polluants.
Il est possible que femelles et mâles soient au moment de la reproduction
(en mer des Sargasses) victimes des effets de perturbateurs endocriniens
qu'ils ont accumulés dans leur organisme quand ils ont grandi dans les
eaux douces ;
- la pollution lumineuse (la
civelle est sensible à l'éclairage artificiel) ;
- la pollution thermique de
l'eau (certaines usines, les centrales nucléaires et d'autres centrales
thermiques) rejettent des eaux de refroidissement qui sont jusqu'à plus de
10 °C plus chaudes que le milieu naturel où ces eaux sont rejetées. Ces
chocs thermiques peuvent affecter la santé des civelles, d'autant que les
eaux de centrales thermiques sont en outre chlorées pour tuer les
animalcules qui cherchent à s'accrocher aux parois de tuyauteries8 ;
- l’introduction d’espèces
invasives comme le silure en France et dans d'autres pays d'Europe et de
parasites ;
- la diminution des zones
humides (en taille, nombre et qualité).
Ce sont autant de facteurs qui concourent à l’extinction de
la civelle dans de nombreuses régions d'Europe et d'Amérique.
12 - Au Pays basque, il était traditionnel dans la
gastronomie de Biscaye et du Guipuscoa, mais sa popularité a été étendue à
d'autres parties du territoire en Espagne. Dans une grande partie de l'Espagne
et du sud-ouest de la France, la civelle est considérée comme un mets très fin
lorsque légèrement frite et servie en caquelon. Avec un prix de 1 000 euros le
kilogramme payé au pêcheur en 2004, la pression halieutique, est très forte sur
cette espèce que l'on ne sait toujours pas faire se reproduire en captivité.
Le plat le plus connu sont les civelles à la Bilbaïna servie
dans une cazuela en terre cuite avec de l'ail et une variété de piment local fumée.
Elle est aussi connue dans la cuisine française dans les secteurs de Nantes, de
La Rochelle et Bordeaux.
Les civelles (angula en espagnol et en basque) sont
généralement commercialisées cuites. Vivantes elles sont transparentes. On les
trouve d'habitude conditionnées sous vide.
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